mercredi 28 novembre 2012

Contre le gaspillage alimentaire, l’UE mise sur l’information


On l’oublie, mais au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l’Europe n’est pas autosuffisante sur le plan alimentaire. Elle importe 80 % de ses besoins et le rationnement perdure dans certains pays jusqu’au début des années 1950.
Soixante ans et une politique agricole commune plus tard, l’abondance fait place à la pénurie, et avec elle un effet pervers… le gaspillage. Selon une étude de la Commission européenne de 2010, 89 millions de tonnes de nourriture propre à la consommation sont mises aux rebus tous les ans.

Pas de chiffres français 

Les raisons de ce gâchis sont nombreuses et difficiles à quantifier tout au long de la chaîne alimentaire : déchets de la production, pertes lors du transport, expiration des dates de consommation, etc.
L’ONG France Nature Environnement (FNE) s’est penchée sur le problème depuis la fin des années 1990. « Selon une projection de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, sur les 280kg de nourriture gaspillés tous les ans par chaque Européen, le consommateur est responsable du gâchis de 115kg, soit plus d’un tiers », explique Laureline Bourit chargée de mission sur la prévention des déchets pour FNE. Le reste du gâchis a lieu par exemple dans les cantines ou les restaurants.
Dès son arrivée au gouvernement, le ministre français délégué à l’Agroalimentaire, Guillaume Garot, a fait de la lutte contre le gaspillage une priorité. Il souhaite diviser le gâchis par deux d’ici 2025.
Atteindre le zéro déchet est impossible, certaines pertes de matières non consommables, comme les os de viande par exemple, sont inévitables.
Pour améliorer le cas français, « il nous faudrait d’abord des chiffres précis sur la situation du pays, ce que nous n’avons pas », prévient cependant Mme Bourit, qui attend toujours la réponse du ministère sur ce point. Ce constat est partagé par l’Association nationale des Industries agroalimentaires (ANIA). Le secteur industriel fournit 15 % des dons des banques alimentaires, 25 % venant du secteur de la distribution.
Les propositions de Guillaume Garot rejoignent en partie les voeux du Parlement européen, formulés dans une résolution (non contraignante) en janvier 2012.
Diversifier la taille des emballages pour permettre aux consommateurs d’acheter ce dont ils ont besoin, ou vendre à prix réduits les produits légèrement abimés et ceux dont la date est dépassée sont quelques-unes des idées avancées.

Exemple britannique 

Pour FNE, en Europe, le Royaume-Uni est l’exemple à suivre. A la fin des années 2000, le gouvernement a fait de la lutte contre le gaspillage alimentaire une cause nationale. « Leur approche était avant tout économique. Les autorités ont mis en avant son coût, estimé à 12 milliards de livres sterling par an et ont organisé une importante campagne de communication à destination des citoyens », explique Laureline Bourit.
Mauvaises récoltes, spéculation, demande des biocarburants… le prix des denrées alimentaires atteint des sommets depuis quelques années en raison de la conjoncture internationale. L’ancien premier ministre Gordon Brown avait donc mis ce sujet à l’agenda du G8 de Tokyo en 2008.
Selon un document de la Commission européenne daté de 2009, la campagne de prévention britannique a permis de sauver 137 000 tonnes de nourriture de la poubelle.

Communication en 2013 

A Bruxelles, l’exécutif européen estime qu’une meilleure information est l’un des outils-clés pour améliorer la prévention.
« L’étiquetage est souvent mal interprété, les gens ne font pas bien la distinction entre’consommer de préférence avant’, qui est un critère de qualité et’consommer avant’, qui est un critère de sécurité », précise Chantal Bruetschy, chef de l’unité Innovation et développement durable de la Direction générale Santé et Consommateurs dans un entretien accordé à EurActiv Bruxelles. Cette différenciation des dates sur les étiquettes est justement une pratique utilisée au Royaume-Uni.
Mais pas question pour Bruxelles de rouvrir la boîte de pandore du règlement sur l’étiquetage alimentaire, adopté en 2011 après plusieurs années de négociations.
A l’époque, les préoccupations sur le gaspillage alimentaire n’ont pas été prises en compte. Pourtant, « une réflexion européenne est nécessaire », estime Laurence Champier, porte-parole des banques alimentaires.
« Nous aurions besoin de changer la terminologie des dates de consommation et leur définition », explique-t-elle.
Les règles actuelles rendent le travail des associations caritatives très difficiles.Dès la date limite d’utilisation dépassée, les commerçants ne peuvent plus donner les produits, considérés de facto périmés. « Nous aurions besoin de dates plus précises, plus ciblées à chaque produit, aujourd’hui, tout fonctionne par catégories qui ne prennent pas en compte les spécificités de chaque produit, comme le pain », se désole-t-elle.
Cette position n’est pas partagée par Carole Fonta, directrice du développement durable de l’ANIA qui travaille sur des propositions pour le futur plan d’action du gouvernement français. « Nous ne pensons pas que revoir la définition des dates soit une bonne chose, cela correspond à des règlementations fixées au niveau européen », déclare Mme Fonta.
« En revanche, nous réfléchissons à la manière de lever les freins aux dons des entreprises, qu’ils soient juridiques ou logistiques », poursuit-elle.
Pour le moment, rien de très contraignant à l’horizon. La Commission doit se prononcer en 2013, sous la forme d’une communication. De leur côté, les députés ont demandé que l’année 2014 soit désignée « année européenne contre le gaspillage alimentaire ».

Source: Euractiv (http://goo.gl/QXpdZ)

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