mardi 25 mars 2014

En dix ans, le « drive » a révolutionné la distribution française

Ce format approche les 3.000 unités et pèsera bientôt plus lourd dans l’alimentaire que les magasins de proximité. Mais le concept de commande sur Internet et de retrait en magasin ou entrepôt doit améliorer sa qualité de service.

Inventé en 2004 dans le nord du pays par Chronodrive (voir ci-dessous), le « drive » fête ses dix ans. Et, sans conteste, cette forme de courses, qui consiste à commander sur le Net ses produits alimentaires et de grande consommation, puis à aller chercher sa commande en voiture dans un entrepôt dédié ou sur le parking spécialement aménagé d’un supermarché, est entrée dans les habitudes des consommateurs français. Un quart des ménages utilise, désormais, le « drive » et 3 millions de Français le fréquentent 10 fois par an et y consacrent 23 % de leurs dépenses annuelles, note Gaelle Le Floch dans une note récente de Kantar Worldpanel. Ce circuit de distribution réalise 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel, selon Kantar. L’étude Drive Insights estime, elle, le marché, à 3,8 milliards d’euros TTC, avec deux leaders, Leclerc et le groupe Auchan, pour lesquels le « drive » pèserait, respectivement, 1,5 et 1 milliard d’euros.
Après un démarrage assez lent, le « drive » a explosé au cours des trois dernières années. Sa part de marché dans l’univers des produits de grande consommation est passée de 0,7 % en janvier 2011 à 3,9 % en janvier 2014. Début 2014, sur un an, il était le seul circuit de distribution à gagner des parts de marché. Et Kantar estime que sa part devrait atteindre, à la fin 2015, entre 6 % et 8 % du marché alimentaire français. En d’autres termes, l’année prochaine, le « drive » pèserait autant que les magasins de proximité, dont tous les experts ont affirmé ces dernières années qu’ils étaient l’avenir du commerce mondial !

Phase de maturité

Pour autant, la croissance du « drive » ralentit. Les ouvertures se succèdent, mais on commence à voir des fermetures. Le marché entre dans sa phase de maturité. Des ajustements ont lieu. Les enseignes qui ont démarré après Auchan et Leclerc, comme Carrefour, regagnent du terrain. Le gouvernement a entrepris d’encadrer le développement du format. Alors que le territoire compte déjà près de 3.000 unités (2.838, selon Drive Insights), les nouvelles créations ne recrutent plus de nouveaux clients. Ce qui pose des questions sur la viabilité de son modèle économique. Le « drive » a été rentable pour les enseignes qui sont allés vite et ont, ainsi, pris des clients à leurs magasins concurrents. C’est le cas de Leclerc, groupe pour lequel le « drive » a constitué 30 % de la croissance récente. Mais, selon l’analyse de Salim Poonawala, chez Oliver Wyman, développée lors de la dernière conférence grande consommation organisée par Les Echos Events, « au final, ce sera un jeu à somme nulle ». Et le « drive » deviendra un service supplémentaire offert par les distributeurs à leurs clients, avec le coût induit...
Un coût qui, si l’on en croit Kantar Worldpanel, pourait encore augmenter afin de hausser la qualité de service. Indisponibilité des produits, mauvaise préparation des colis, créneau des horaires de livraison trop court : la liste est longue des problèmes d’exécution. Seuls les pionniers Chronodrive, Auchan et Leclerc semblent exempts de reproches.
Autre bataille à gagner : celles des produits frais. Aujourd’hui, le « drive », c’est la solution aux courses corvées – les packs d’eau, les couches, la lessive, etc. L’enjeu est de passer aux courses plaisirs. Mais les auteurs de Drive Insights notent que, au contraire, l’assortiment des « drives » s’appauvrit, s’établissant en moyenne à 10.102 produits. Casino Express, par exemple, a retiré 1.000 produits de son offre en deux mois. De son côté, le nouveau service de livraison à domicile développé par Amazon (voir ci-contre) s’appelle Amazon Fresh... Et il peut proposer jusqu’à 30.000 références ! Il pourrait arriver bientôt en Europe via l’Allemagne.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire