lundi 3 mars 2014

Le marché du "bio" alimentaire est en croissance

Alors que le Salon de l'agriculture a fermé ses portes, la société d'études Xerfi publie un dossier spécial "agro-alimentaire" qui contient un volet sur l'agriculture bio. Zoom sans additif.

Isabelle Senand, Xerfi DR
Isabelle Senand, Xerfi DR

La filière de l'alimentation "bio" a-t-elle profité du désir des consommateurs pour des produits sains, depuis le scandale de la vache folle ? Le marché est-il encroissance ? Quelles sont les tendances de ce marché révélées au Salon de l'agriculture ? La France est-elle bien placée sur ce marché ? Réponses d'Isabelle Senand, directrice d'études à Xerfi, auteur d'une étude sur la distribution de produits bio".
Quelles sont les tendances que vous avez repérées concernant le bio lors du Salon de l'agriculture ?
Ce sont surtout des confirmations de tendances enclenchées il y a quatre ou cinq ans qui ont pu être constatées : la vogue du "made in France", par exemple, ou encore la tendance du "locavorisme" -à savoir le fait de ne consommer que des produits produits localement, dans l'environnement immédiat du consommateur. Par ailleurs, des réponses ont été apportées à l'accusation que supporte le "bio" en France, à savoir une tendance à l'importation : aujourd'hui, seulement 25% des produits bio consommés en France sont importés, contre 38% en 2009. En Europe, la France ne s'en sort pas trop mal: nous sommes numéros 2 derrière l'Allemagne pour la consommation de produits bio et, pour la production, numéros 3 derrière l'Allemagne et l'Italie.
Et quelles tendances de marché avez-vous décelées ?
Déjà, le marché du bio pèse  4, 1 milliards d'euros en France, et la part du bio représente aujourd'hui 2% de l'alimentation des Français, contre 1% en 2006.
Ce marché est toujours en croissance: nous avions prévu +3% en 2013, en fait la croissance a atteint  5% environ. Les grandes et moyennes surfaces voient leur part de marché augmenter : elle passe de 35% en 2000 à 50% en 2011. Les réseaux spécialisés se sont bien défendus, avec 27% de part de marché, et on a vu émerger des réseaux de plus en plus puissants sous enseigne "bio" spécifique: les réseaux Bio c' bon, Naturalia, Biocoop. Enfin, les boutiques indépendantes vont de plus en plus être amenées à rejoindre des réseaux spécialisés "Bio".
Quelles sont les attentes actuelles des consommateurs ?
Essentiellementl la traçabilité et la naturalité. Les consommateurs veulent en effet un maximum d’informations sur la composition et l’origine des aliments. Ces attentes, qui sesont accentuées après les récents scandales sanitaires, constituent de véritables opportunités pour les opérateurs de l’agroalimentaire.
L'alimentation "bio", c'est un concept qui semble assez vague: quels sont les grands segments du "bio alimentaire" ?
On distingue d'abord les produits biologiques (4,1 milliards d’euros en 2013 selon nos calculs). Ce marché répond à l'exigence de naturalité et progressera de 4,5% en 2014 et de 6% en 2015 pour atteindre 4,6 milliards d’euros. Ensuite, on peut citer les aliments Bleu Blanc Cœur (556 millions d’euros en grandes surfaces en  2013 selon nos calculs). Ces produits enrichis en oméga 3 par une modification de l’alimentation des animaux font l’objet d’un suivi continu depuis l’élevage. Grâce à l’aspect santé et aux garanties de traçabilité, les ventes augmenteront de 6% en 2014 et de 7% en 2015 pour représenter 630 millions d’euros.
Ensuite, on compte les produits sans gluten, un marché de 80 millions d’euros en 2013 d’après nos calculs. Ce marché, qui séduit de plus en plus les consommateurs en dehors de la cible des allergiques et des intolérants au gluten, devrait croître de 30% par an en 2014 et 2015 à 135 millions d’euros. Et enfin, les produits « clean label ». Les ventes de ces aliments, dont la liste des  ingrédients a été simplifiée (sans conservateurs, sans additifs,…), bénéficieront des nouvelles tendances de consommation. Ce marché, qui ne peut se chiffrer précisément, concerne un nombre croissant de produits.
Si le marché est en augmentation, les industriels doivent-ils continuer à communiquer?
Oui, car en fait  seule une minorité de consommateurs leur fait confiance! Pour reconquérir le cœur des Français, ces opérateurs devront communiquer davantage sur la traçabilité et la naturalité des produits. Certains insistent sur la proximité avec l’amont des filières agricoles. C’est le  cas des contrats entre producteurs laitiers et transformateurs. D’autres opérateurs privilégient le « made in France ». Findus, par exemple, a relocalisé sa production de poissons à Boulogne-sur-Mer.
Les industriels et les fabricants de produits intermédiaires surfent aussi sur le concept de naturalité. Contrairement aux allégations « santé », le caractère «naturel» des produits n’est pas soumis à la réglementation. Jouer la carte de la réduction de la teneur en sucre, sel, (etc.) améliore le profil nutritionnel des aliments. Les acteurs peuvent aussi s’engager dans le cadre du Programme National de Nutrition Santé (PNNS), à l’image des chartes signées par Nestlé. La suppression ou le remplacement d’additifs, de conservateurs et autres adjuvants pour proposer des produits plus « naturels » est aussi une alternative. Par exemple, Mondelez International supprimera les matières hydrogénées dans les biscuits LU début 2014 tandis que certains substituent déjà la stévia au sucre.
Les distributeurs, eux, ne produisent rien : doivent-ils eux aussi regagner la confiance des consommateurs ?
Oui, les distributeurs doivent valoriser leur offre de MDD ("marque de distributeur" NDLR) et regagner la confiance de leurs clients car ils souffrent également d’un déficit d’image. Pour cela, ils peuvent compter sur l’image de leurs marques propres référencées sur le segment terroir, comme par exemple Reflets de France de Carrefour, ou en santé (Casino bien pour vous ! de Casino). Mais pour séduire toujours plus de consommateurs et se différencier de la concurrence sur leur zone de chalandise, ils élargissent leur offre de produits locaux.
Et concernant les garanties de traçabilité ?
Pour sécuriser les approvisionnements et garantir la traçabilité de leurs produits, les distributeurs mettent aussi en avant leurs liens avec l’amont des filières alimentaires. Ainsi, par exemple, l’Engagement Qualité de Carrefour ou les Alliances Locales de Leclerc renforcent le lien avec les exploitants agricoles. En termes de naturalité, les distributeurs élargissent leur offre de produits biologiques, certifiés sans OGM (alimentation sans OGM des poulets fermiers d’Auvergne labellisés Engagement Qualité Carrefour), sans traitements chimiques, (etc.)
Et qu'en est-il du marché du bio au niveau des restaurants ou de la restauration hors-foyer ?
La restauration hors foyer ne reste pas inactive ! Elle  se montre aussi attentive aux attentes des consommateurs en matière de traçabilité et naturalité. Aujourd’hui, les opérateurs réalisent de nombreuses analyses sur les aliments et matières premières livrées dans leurs restaurants. API Restauration effectue ainsi plus de 5 000 analyses chaque année.
De plus, certains n’hésitent plus à informer en temps réel le client en détaillant l’origine des produits sur leur menu. A titre d’exemple, Hippopotamus (Groupe Flo) affiche son partenariat avec les éleveurs AOC Maine-Anjou sur sa nouvelle carte (octobre 2013).
Enfin, la nécessité de proposer des menus plus équilibrés en restauration hors-foyer incite les industriels en amont à élargir leurs gammes de produits locaux en foodservice. C’est le cas avec la gamme de légumes « 100% cultivé en France » de D’aucy (CECAB).

Source: Challenges (http://goo.gl/SLi29Z)

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