Depuis le vent de panique du 24 mai 2011, quand 24 personnes étaient décédées après avoir mangé des graines porteuses de la bactérie Escherichia coli, une attention accrue se porte sur les poisons qui polluent nos aliments. Une étude de l’Anses en 2010* en a pointé 445…
Pas de panique, on a fait le tri pour vous !
Voici les principales substances toxiques à connaître et à éviter (si possible).
Les produits chimiques ont envahi notre assiette
Depuis la seconde guerre mondiale, les industriels ont développé des dizaines de milliers de molécules chimiques, dont plusieurs milliers sont utilisées pour fabriquer des aliments ou pour l’agriculture. Ces molécules se sont répandues dans la nature, dans les sols, les cours d’eau, … bref dans toute la chaîne alimentaire. Colorants, additifs, produits de synthèse (faux sucre, faux sel, …) sont présents dans l’alimentation mais aussi dans les emballages.
Ne noircissons pas le trait ; au quotidien, très peu de personnes subissent d’intoxications alimentaires à cause de ses substances. Non, c’est plutôt l‘accumulation dans le temps de doses homéopathiques de nombreuses molécules qui pose problème.
Répétition de doses infimes + effet cocktail = danger potentiel
20 000 produits alimentaires passés au crible
L’Anses a passé au tamis toutes sortes d’aliments (soupes, salades, yaourts, fruits, …) frais, surgelés ou en conserve, achetés dans 1500 points de vente, pour identifier 445 substances qui posent problème : une vraie photo panoramique de notre alimentation nationale. Et un reflet de notre exposition à ces insidieux poisons.
Les bonnes nouvelles :
certains polluants sont moins présents : le plomb, le mercure, l’arsenic et certaines mycotoxines ont été moins identifiées. L’Anses a trouvé 4 fois moins de dioxines ou le PCB qu’en 2004.
Pour 307 substances ne dépassent pas la VTR, autrement dit, pour 85% des 445 substances analysées, il n’y a aucun risque.
Les moins bonnes :
Pour 12% des substances recherchées par l’Anses, le risque toxicologique ne peut être écarté.
54 substances (plomb, arsenic, aluminium…) sont présentes à une concentration à des niveaux supérieurs aux « seuils de sécurité », les VTR (valeurs toxicologiques de référence) qui correspondent aux DJA (doses journalières admissibles). Par exemple, 2% des enfants sont exposés à un risque toxicologique dû à l’aluminium parce qu’ils mangent certains aliments qui en contiennent.
Pour 72 substances, l’Anses n’a pas pu se prononcer.
Manger cru accroît, en moyenne, le risque toxicologique.
Certaines substances sont plus présentes que lors de la précédente étude de 2004 : le nickel (qui se trouve dans les fruits secs, le chocolat, les graines oléagineuses), l’antimoine (mollusques, crustacés, fruits cuits), le cobalt (beurre, abats, chocolat), le déoxynivalénol (une mycotoxine présente dans le pain).
On savait déjà que les dioxines, les nitrates, les pesticides et les métaux lourds nuisent à nos aliments. Mais l’Anses pointe des substances moins connues ou plus surprenantes : des composés perfluorés, des retardateurs de flamme bromés, des mycotoxines (des champignons qui prospèrent avec de mauvaises conditions de stockage) ou encore des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) dont 32% proviennent du transport routier, sont tout aussi nuisibles pour notre organisme.
Des substances toxiques persistantes qui agissent longtemps …
On appelle ces substances des polluants organiques persistants (POP) : ce sont les dioxines, PCB, pesticides, etc. Une étude suédoise publiée dans la revueEnvironmental Health Perspectivesa montré qu’ils peuvent favoriser l’athérosclérose. Une autre étude canadienne de 2010 montrait que des POP présents dans les emballages de fast-food à l’épreuve des graisses (papiers sulfurisés) et de popcorn à éclater migrent dans les aliments et sont ingérés par les consommateurs. Et ils y restent. On utilise aussi des POP, comme les PFOA , dans la fabrication des casseroles et des poêles anti-adhésives.
L’effet cocktail, mesurable … mais pas mesuré
C’est le mélange des substances qui fait peur aux toxicologues, plus encore que le niveau des polluants pris individuellement. Cet effet cocktail est particulièrement redouté quand il est composé de perturbateurs endocriniens (phtalates, bisphenol A, parabens).
95% des Américains ont du bisphenol dans les urines et 90% des bébés ont été exposés aux phtalates dans le ventre de leur mère. Or, les chercheurs soupçonnent d’avoir un rôle dans les problèmes de tension artérielle, de diabète, cancer ou stérilité.
On sait désormais mesurer de manière fiable certains effets cocktail grâce à des outils analytiques biologiques complexes qui évaluent l’effet d’un ensemble de molécules sur certains paramètres biologiques.
L’Anses n’a pas utilisé ces méthodes, mais a conservé des échantillons pour pouvoir en faire ultérieurement
Autre réserve : l’étude ne fait pas la distinction entre les aliments transformés industriels ou bruts et le bio.
Conclusion : faut-il avoir peur de l’alimentation moderne ?
Non, loin de là ! La France dispose d’un dispositif de sécurité sanitaire parmi les meilleurs du monde, et les substances qui posent problème sont sous surveillance étroite, car elles exposent une petite partie de la population à un vrai danger potentiel.
Les aliments modernes sont dans l’ensemble sûrs et il n’y a, comme le confirme l’étude, qu’un très petit nombre d’aliments qu’il faut éviter de consommer en grandes quantités et régulièrement.
Finalement, comme toujours, ma recommandation est d’acheter de tout, d’éviter de choisir les aliments les plus pollués, de bien laver les aliments, et de conserver une alimentation bien équilibrée.
La pollution ferait grossir les enfants ?
Ce n’est pas une blague, mais la conclusion d’une étude espagnole (2) qui démontre qu’exposer des enfants avant leur naissance à divers produits chimiques les prédispose à être gros plus tard, favorisant l’augmentation de l’obésité dans la population. A vérifier avec d’autres études à venir.
*
(1) Lars Lind de l’Université d’Uppsala et Monica Lind duKarolinska Institutet ont mené cette étude avec 1000 résidents de la ville d’Uppsala. Les personnes avec les taux les plus forts de polluants dans le sang présentaient plus d’athérosclérose.
(2) menée par l’Institut municipal de recherche médicale de Barcelone, publiée dans Acta Paediatrica, 2008.
La liste des principaux polluants de notre alimentation
L’acrylamide
Se trouve : frites, chips, biscuits salés ou sucrés, pommes de terre sautées, …
Risques : problèmes neurologiques, peut-être cancérigène (à l’étude), …
Population à risque : moins de 1% des adultes et des enfants
L’aluminium
Se trouve : dans emballages alimentaire qui deviennent nocifs uniquement quand ils sont en contact direct avec des aliments acides comme des tomates, de la rhubarbe, de l’oseille, du citron… qui vont attaquer l’aluminium.
En décembre 2000, la Direction Générale de la Santé (DGS) avait déjà saisi les agences de sécurité sanitaire afin d’évaluer les possibles effets néfastes de l’aluminium sur la population, notamment un éventuel lien avec la maladie d’Alzheimer. Et si l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS) a de son côté souligné dans un rapport publié en 2003 le manque de données pertinentes quant à l’absorption d’alumine par voie cutanée, elle n’a remis que partiellement en cause l’opinion de la DGS.
Riques : le risque est que l’aluminium fasse son chemin jusqu’au cerveau en passant par la barrière intestinale grâce au fait qu’il est soluble dans les graisses. Là il y accélérerait le vieillissement cellulaire. Il est également dangereux s’il arrive à pénétrer dans le corps, par exemple à l’occasion d’un vaccination en intramusculaire car il peut déclencher la myofasciite à macrophages, une maladie très douloureuse. Idem s’il pénètre lors d’une hémodialyse car il pourrait provoquer une encéphalite.
> L’aluminium dans les cosmétiques :
– En mars 2012, le magazine 60 Millions de Consommateurs a mené enquête sur la présence de l’aluminium dans nos cosmétiques et notamment les déodorants (mais aussi dans le sel, les conservateurs, les colorants, les levants, les poudres pour bébé) malgré des risques avérés. Fin 2000, la Direction Générale de la Santé avait interrogé les agences de sécurité sanitaire sur les éventuels effets néfastes de l’aluminium sur la santé et un possible lien avec la maladie d’Alzheimer. L’AFSSAPS en 2003 a conclu qu’on n’a pas assez de données pertinentes quant à l’absorption d’alumine par voie cutanée pour conclure mais ne nie pas un éventuel risque.
L’arsenic
Se trouve : dans les poissons, crustacés, mollusques, lait, eau…
Population à risque : 1 à 27% des enfants, 1 à 33% des adultes
Risques : maladies cardiovasculaires, cancers, lésions cutanées…
Le cadmium
Se trouve : dans les produits de panification sèche et le pain, pommes de terre et apparentés, le foie, les champignons, les moules, les mollusques, les crustacés, la poudre de cacao et les algues séchées. Le cadmium se trouve dans les phosphates qui servent d’engrais. Considéré comme une impureté de certains minéraux comme les phosphates, le cadmium n’a aucune utilité pour le corps. Au contraire, bien que présent à l’état de traces dans notre environnement, le cadmium va s’accumuler dans les céréales, puis dans notre organisme quand on consomme ces céréales cultivées avec ces engrais contaminés. Le cadmium modifie les protéines, puis se stocke dans les reins, les os, le système nerveux, les dents. Il est suspecté d’avoir un rapport avec le cancer de la prostate.
Population à risque : moins de 1% des adultes et 15% des enfants
Risques : fragilité osseuse, troubles rénaux, troubles de la reproduction, cancers, …
Notons qu’il n’y a pas de risque avec les produits de l’agriculture bio.
> Encyclo : le cadmium
Le diméthoate
Se trouve : ce pesticide se trouve dans les endives, les cerises…
Risques : problèmes neurologiques, peut être cancérogène
Population : les gros consommateurs de cerises, soit moins de 1% des adultes et des enfants
Consommation de pesticides phytosanitaires en France
Les dioxines
Se trouvent : fromages, lait, poissons, produits laitiers ultra frais, huile…
Population à risque : moins de 1% des adultes et des enfants
Risques : maladies cardiovasculaires, malformation du fœtus, affections de la peau…
L’hexachlorobenzène (HCB)
Se trouve : ce fongicide se trouve dans les semences de blé. Aujourd’hui interdite*, cette molécule est toujours présente dans la nourriture et l’environnement
Population à risque : les femmes enceintes et les foetus. Tous les cordons ombilicaux analysés par l’équipe espagnole citée plus haut contenaient du HCB.
Risque : la molécule franchit la barrière placentaire, se concentre dans les tissus foetaux ou le lait maternel et est soupçonnée de déclencher chez la mère un diabète de type 2 (le pancréas ne sécrète plus assez d’insuline).
* Le HCB est interdit dans le monde entier depuis la Convention de Stockholm, le 17 mai 2004
Le mercure
Se trouve : chocolat, mollusques, crustacés, poissons, dont le thon qui représenterait 40% de l’exposition au composé de mercure de la population américaine.
Risques : troubles rénaux, du développement du fœtus, neurologiques ou cardiovasculaires…
Population : les grands consommateurs de thon, soit moins de 1% des adultes et des enfants, femmes enceintes (Dans plusieurs pays, les autorités sanitaires conseillent à la population, et particulièrement aux femmes enceintes, de limiter leur consommation de certains poissons prédateurs comme le thon frais ou congelé, le requin, ou l’espadon, etc.)
Alimentation. Alerte au mercure dans les poissons
Le mercure des plombages
Le mercure se trouve au premier cher dans les amalgames dentaires. Ceux-ce seraient même la première source d’intoxication au mercure en France depuis qu’on a élaboré, dès le XIXe siècle, des amalgames dentaires à base d’un alliage de mercure (50%), d’étain, de zinc et/ou de cuivre. Comme les amalgames ne sont ni des aliments ni des médicaments, ils n’ont pas fait l’objet d’une « autorisation de mise sur le marché » et donc des tests sanitaires qui vont avec. Pourtant, on connait depuis longtemps les ravages du mercure car on l’a très longtemps utilisé comme cosmétique ou médicament (!).
. Dès 1919, l’intoxication au mercure a été considérée comme une maladie professionnelle. De nos jours, le 2ème Plan National Santé Environnement fixe l’objectif de réduire de 30% les rejets de plomb d’ici 2013.
. Alors faut-il refuser les amalgames au plomb ou au mercure ? Notre réponse est oui, même si l’Ordre des dentistes français soutient que les amalgames dentaires contiennent une quantité négligeable de mercure et que le mercure dentaire est stable, qu’il n’est ni absorbé, ni toxique. En Allemagne, en Autriche, en Australie et au Canada, il existe des interdictions partielle des amalgames au mercure. L’Afssaps, l’Agence française de sécurité sanitaire, accusée d’être trop laxiste par des associations anti-mercure, a retiré de son site web un rapport sur le mercure. Il était accusé d’être trop partial et de ne pas assez tenir compte des diverses études scientifiques qui existent sur le sujet.
> Préférez les amalgames qui utilise, par exemple, du ciment verre ionomère, aussi facile à appliquer que le mercure, tout aussi solide et pas cher. C’est dans ce sens que vont les recommandations de l’OMS sur les matériaux alternatifs en octobre 2011.
Les mycotoxines ou toxines de moisissures
Se trouvent : dans les moisissures de céréales, pâtes, chocolat, pain et produits de panification sèche
Population : moins de 1% des adultes et de 5 à 10 % des enfants
Risques : troubles neurologiques, hépatiques ou immunitaires, intoxications alimentaires…
Les nitrates et nitrites
Se trouvent : le E249 et E250 pour les nitrites et du E251 et E252 pour les nitrates se trouvent : dans les eaux fluviales à cause de l’agriculture trop intensive et sont utilisés comme additifs dans les charcuteries pour qu’elles ne soient pas gris-marron mais bien rosées.
Population : potentiellement, tout le monde est concerné
Risques : dans notre corps, se transforment en nitrosamines, substance toxique selon les doses absorbées et qui favorise l’apparition de cancer. Elles jouent un rôle dans la baisse de production des hormones sexuelles par l’augmentation des infertilités.
Les pesticides et autres produits phytosanitaires
Les pesticides méritent à eux seuls plusieurs articles. Nous en parlons donc par ailleurs car la situation est vraiment alarmante même s’il y a des signes d’amélioration : un peu moins de pesticides dans nos légumes.
Les PCB
Se trouvent : les PCB, aussi appelés biphényles polychlorés ou pyralènes se trouvent dans les poissons, beurre, produits laitiers ultrafrais, viandes, lait… Au Canada, la 1ère source d’exposition aux PBC est la consommation de poissons issus de milieux pollués.
Risques : affections cutanées, troubles hormonaux, pulmonaires, hépatiques, …
Population à risque : moins de 1% des adultes et 2% des enfants.
Voir : les PCB
Alimentation, le point sur les PCB
Kilos de PCB rejetés dans la nature en France
Les sulfites
Se trouvent : ces additifs se trouvent dans le vin, champagne, cidre, boissons alcoolisées…
Risques : allergies, intolérances alimentaires aggravées chez les asthmatiques…
Population : les gros consommateurs de vin, soit 3% des adultes.
Le plomb
Se trouve : le plomb nous attaque par les canalisations. Et cela ne date pas d’hier puisque déjà les Crétois de l’Antiquité qui avaient installé des canalisations en plomb s’étaient aperçu qu’ils tombaient malades après avoir bu de l’eau. Comme le plomb solubilise dans l’eau, on a interdit les canalisations en plomb. Mais toutes les adductions d’eau n’ont pas encore été remplacées partout.
Autre source insidieuse de plomb : les vieilles peintures qui n’ont pas été remplacées et qui s’écaillent en produisant des poussières que l’on respire. Rappelons également l’interdiction, pas si ancienne, du plomb dans l’essence. On ajoutait du plomb tétraéthyle dans l’essence pour empêcher les détonations.
Risques : le plomb se diffusait sous forme gazeuse et finissait dans nos poumons. On en a respiré pendant des années ! Depuis la suppression du plomb dans l’essence, on a constaté une augmentation du QI mesuré par les enquêtes et une baisse des taux de plomb dans le sang de nos concitoyens.
et aussi :
Les anti-foulings
Ces peintures « antisalissures » sont utilisées sur les coques de bateaux afin d’empêcher les organismes marins de s’y fixer. Elles contiennent des composés organostaniques, comme le tibutylétain, qu’on retrouve dans la chair des poissons.
Peut-on se dépolluer par l’alimentation ?
Il est possible de recourir à des approches naturelles pour se dépolluer.
Tout d’abord, éviter de se polluer en évitant les sources de pollution bien sûr.
> On peut recourir au sélénium qui est un détoxifiant naturel. Son rôle est d’aider les métaux traces comme le mercure de précipiter sous une forme insoluble et non toxique. On trouve du sélénium dans les crucifères (toute la grande famille des choux et du brocoli) et dans les asperges. On peut aussi consommer les poissons gras les moins pollués par les métaux, comme le hareng, le maquereau, la sardine, l’anchois.
> Il faut aussi faire attention aux aliments qui contiennent trop d’additifs alimentaires, trop d’édulcorants, de conservateurs ou trop de colorants. Essayez de choisir des aliments qui n’en contiennent pas plus de 3. (Alimentation. attention aux additifs)
> Attention aussi aux emballages (plastiques notamment) et aux encres des emballages qui, en contact avec les aliments, peuvent transférer à ceux-ci les substances chimiques qu’ils contiennent, comme par exemple le bisphénol A, dont ne parle pas le rapport de l’Anses. (voirBisphénol A et emballages ou Conseils pour conserver vos aliments sans polluer !…)
Et dans le bio, pas de toxiques ?
Dans l’agriculture bio, on utilise des pesticides d’origine naturels mais qui ne sont pas inoffensifs pour autant : sels de cuivre, pyrèthres, roténone, soufre. Ces substances ne sont pas sans risques pour la santé mais les risques sont relativement limitées par leur dégradabilité élevée.
> Résultat, au niveau européen, l’Anses a mesuré que 0,9% des produits bio dépassent les seuils autorisés (contre 3,7% pour les produits issus de l’agriculture ordinaire).
Source: http://goo.gl/3e6ws
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