mercredi 17 juillet 2013

Les Jardins du Baluchon: penser l'agriculture autrement

Selon Statistiques Canada, la ferme québécoise moyenne compte 106 hectares, une superficie qui s'est accrue de 35,6 % depuis 1981. Toujours plus gros, pour une meilleure rentabilité. Vraiment? Rencontre avec des jardiniers qui pensent autrement.

Clotilde Paulin et Donald Bérubé sont les propriétaires des Jardins du Baluchon, une ferme maraîchère certifiée biologique par Québec Vrai, située dans le Rang 2 de Saint-Germain.
Depuis quatre ans, ils ont fait le pari de mettre en pratique les enseignements de Jean-Martin Fortier, agriculteur de Saint-Armand et auteur du livre Le jardinier-maraîcher, publié chez Écosociété. « Jean-Martin a rendu très concrète la théorie que nous avions reçue auprès de Denis LaFrance et de Yves Gagnon, des pionniers de l'agriculture biologique au Québec », affirme Clotilde Paulin.

Des planches surélevées et un sol en santé permettent des rendements élevés pour les Jardins du Baluchon.
La méthode préconisée est peu connue au Québec. On l'appelle « méthode bio-intensive »1. Il s'agit essentiellement de maximiser le rendement de la surface disponible, tout en améliorant constamment la qualité des sols. La technique consiste à cultiver sur des plates-bandes surélevées. Ces planches, permanentes, sont enrichies d'une grande quantité de matière organique qui bâtit rapidement un sol riche et vivant. Elles ne sont jamais labourées, mais simplement ameublies en surface et amendées de compost. La culture sans tracteur permet de garder intacte la surface du sol. La terre demeure ainsi meuble et fertile et les racines peuvent s'étendre en profondeur. Cette technique permet aussi de cultiver très densément sans que les plantes se gênent au niveau des racines. Les jardins du Baluchon disposent également d'une petite serre pour faciliter les semis des tomates, aubergines et poivrons.
Leur production d'une cinquantaine de variétés de légumes, fruits et fines herbes est écoulée sous forme de paniers ASC (agriculture soutenue par la communauté). Selon cette formule, l'acheteur paie à l'avance ses légumes pour tout l'été, ce qui permet au producteur de couvrir les frais de démarrage pour la saison et lui assure un revenu stable. Cette méthode crée une solidarité réelle entre l'agriculteur et le consommateur, puisque les deux partenaires sont également tributaires des aléas de Dame Nature. Clotilde et Donald fournissent des paniers hebdomadaires à 65 clients et écoulent le reste de leur production au marché public de Rivière-du-Loup. Ils sont également fournisseurs pour le bistro Côté Est de Kamouraska.
Un seul hectare suffit
Aux Jardins du Baluchon, la terre compte neuf hectares, mais un seul est cultivé, le reste constituant une prairie dont le foin est vendu à un producteur de veau de Sainte-Hélène, ce qui fournit un revenu d'appoint pour les jardiniers. Un seul hectare peut-il vraiment faire vivre deux personnes toute l'année? « Pas tout de suite, avoue Clotilde, mais nous sommes persuadés de pouvoir y arriver à moyen terme. Pour l'instant, nous pouvons subsister huit mois avec les seuls revenus des jardins. » Clotilde note que la ferme de Saint-Germain est le troisième emplacement pour les Jardins du Baluchon : « Les déménagements successifs ont coûté cher, mais heureusement, notre méthode de culture nous a permis de ne pas nous endetter exagérément. Pas de gros tracteurs, pas de machinerie lourde, ça nous donne une chance. » Elle croit qu'en augmentant légèrement les ventes au marché public, elle et Donald seront en mesure de laisser tomber leurs emplois d'appoint en hiver.
« Notre mentor, Jean-Martin Fortier, nourrit plus de 140 familles – et fait vivre la sienne – chaque semaine, en ASC et sur des circuits courts de distribution, avec moins d'un hectare en culture. Les techniques qu'il a développées sont une grande source d'inspiration pour nous. »

Le travail manuel du sol en préserve la structure et permet des semis plus serrés, améliorant d'autant la productivité des cultures.
Un modèle qui se répand
Selon Équiterre, l'organisme qui a mis en place et popularisé le concept d'agriculture soutenue par la communauté, plus de 30 000 citoyens s'engagent chaque année auprès d’une centaine de fermes dans 13 régions du Québec. Toutes ces fermes ne produisent pas sur d'aussi petites surfaces que les Jardins du Baluchon, mais ce modèle semble voué à un bel avenir.
Une trentaine d'étudiants se sont inscrits au programme d'agriculture biologique du Cégep de Victoriaville en septembre prochain. À l'ITA de La Pocatière, on s'attend à une dizaine d'inscriptions pour le nouveau programme intitulé Les travaux aratoires par la traction animale, qui vise à répondre aux besoins des agriculteurs exploitant de petites surfaces.
Bien sûr, ce type d'agriculture vise une petite partie du marché, mais il permet d'assurer une occupation dynamique du territoire agricole et de compléter l'offre pour combler d'autres créneaux que l'agriculture intensive. Qui sait, peut-être cette diversité pourra-t-elle stimuler la relève agricole dans les régions? Chose certaine, pour Clotilde Paulin et Donald Bérubé, c'est la voie de l'avenir.
Source: Info Dimanche (http://goo.gl/98co9)

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