Près de deux cents entreprises ont testé l'étiquettage vert, mais des critères communs restent à définir.
Il faudra attendre "au mieux" 2016, voire 2020, pour que l’affichage environnemental devienne obligatoire. Voilà les conclusions du rapport du gouvernement sur l’évaluation de l’affichage environnemental, publié en novembre 2013. Piloté par le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, le système a été testé par 168 entreprises volontaires de tailles et de secteurs différents, de juillet 2011 à juillet 2012.
Son ambition: informer le consommateur sur la qualité environnementale des produits et inciter les fabricants à développer une démarche d’éco-conception. Mis à part l’obligation de communiquer sur l’empreinte carbone, le cahier des charges du ministère a laissé une grande marge de manœuvre aux entreprises, tant sur la forme (pictogrammes, graphiques, notes…) que sur les sujets concernés par l’"étiquetage" vert (biodiversité, déchets…).
Promouvoir l'analyse de cycle de vie des produits
Prévue par l’article 228 de la loi Grenelle II, l’expérience s’est appuyée sur la méthode de l’analyse du cycle de vie (ACV) multicritère. Celle-ci vise à prendre en compte les émissions de CO2, mais aussi à évaluer les différents impacts environnementaux, depuis l’extraction des matières premières jusqu’à l’élimination du bien. Une première pour 47 % des entreprises participantes qui n’avaient jamais réalisé d’ACV auparavant.
La phase test a révélé le manque d’outils et de référentiels, c’est-à-dire de règles de calculs par catégorie de produits. Au moment du lancement de l’expérimentation, les référentiels sectoriels étaient peu nombreux, si bien que seulement 15 % des entreprises les utilisaient, indique un rapport Ernst & Young de février 2013.
L’Association française de normalisation (AFNOR) et l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) travaillent à les développer. En attendant, les entreprises ont dû mettre au point des méthodologies de calcul, souvent à l’aide d’un prestataire extérieur. Selon le gouvernement, la généralisation de l’affichage ne pourra donc se faire qu’à condition de fournir aux entreprises des outils techniques complets.
Un impact relatif sur le consommateur
Site Internet, packaging, stop rayon, application mobile... L’État a laissé les entreprises choisir les supports et les modes de restitution de l’affichage. Les sept associations de consommateurs consultées à la fin de l’expérimentation notent que si les consommateurs demandent davantage de transparence, l’information doit être la plus accessible possible, sur l’emballage du produit par exemple.
De plus, en raison d’un manque de points de comparaison entre différents produits de même catégorie, l’affichage n’a pas modifié les comportements d’achat, "mais plutôt conforté les attitudes d’achat responsable des consommateurs avisés", détaille Stéphane Petitjean, directeur associé du cabinet spécialisé en marketing durable Ethicity.
Les associations de consommateurs ont aussi critiqué la complexité des termes. "Les consommateurs ne comprennent pas nécessairement la notion d’affichage environnemental, alors imaginez leur réaction en lisant le terme ‘eutrophisation’,[prolifération des algues vertes due à la pollution des eaux] !", explique Florence Durbecq, de Force Ouvrière Consommateurs.
Un levier de compétitivité
Selon le rapport d’Ernst & Young, 60% des 168 entreprises se sont déclarées satisfaites d’avoir participé à cette expérimentation. 78% estiment que l’affichage a été un moyen de mieux connaître les performances environnementales dans leur chaîne d’approvisionnement, tandis que 73% considèrent qu’il représente une source de compétitivité potentielle, via une rationalisation des méthodes de production, l’innovation et l’image de marque. Encore faut-il que tout le monde soit logé à la même enseigne.
Le Château Larose Trintaudon, domaine viticole qui produit 1.300.000 bouteilles par an, fait partie des 10% des entreprises ayant cessé l’expérimentation en cours de route. Son secrétaire général, Brice Amouroux, explique: "Nous avions fait le choix de communiquer sur l’étiquette de nos bouteilles. Mais, comme nous étions les seuls viticulteurs à participer à l’expérimentation, nos distributeurs nous ont avertis d’un potentiel désastre. Nous avons quand même tenté l’expérience au Canada et les retours des clients ont été négatifs !".
Vers un cadre européen
Depuis avril 2013, la Commission européenne a lancé sa propre expérimentation pour trois ans. Son outil sera le PEF (product environmental footprint), proche du cadre français. Pour les entreprises, l’expérimentation n’aura pas été vaine.
"Cela leur a permis de mieux appréhender les impacts environnementaux de leurs produits, détaille Stéphane Petitjean d’Ethicity. Elles ont pu analyser leurs points faibles et leurs marges de progression tout en entamant un nouveau type de collaboration avec leurs fournisseurs... Ainsi, le jour où l’affichage deviendra obligatoire, elles seront prêtes." Reste au consommateur la possibilité de se renseigner sur les sites spécialisés, comme Noteo, GoodGuide, Proxiproduit ou Ecocompare. Volontaires ou pas, les entreprises risquent donc d’être de plus en plus sollicitées.
Source: http://goo.gl/20H1Mt
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