jeudi 2 mai 2013

Alimentation dans le futur : que trouverons nous dans nos assiettes ?

Catherine Esnouf, scientifique de l’Inra décrit les nourritures probables du futur : "Il y aura de moins en moins de viande au menu"


Les prévisionnistes s’intéressent en général à la façon dont nous mangerons en 2050, ce qui correspondra normalement au pic démographique de la planète. C’est notamment le cas de Catherine Esnouf, directrice scientifique adjointe du secteur alimentation à l’Inra (Institut national de la recherche agronomique).

« Sud Ouest Dimanche ». On se nourrira de quelle façon, en 2050 ?

Catherine Esnouf. Il est certain qu’avec le développement des économies émergentes et l’accroissement démographique, il y aura des modifications des comportements alimentaires. Il faudra 70 % de ressources en plus pour nourrir toute la population en 2050. Aujourd’hui, nous disposons de la ressource suffisante pour nourrir toute la population mondiale. Le fait que 1 milliard d’êtres humains ont faim n’est pas lié à l’absence de ressources mais aux moyens pour y accéder. En revanche, en 2050, la question de la ressource se posera. On arrivera à une saturation des productions agricoles et la demande se modifiera.
Cela signifie que nous mangerons moins ?
Très probablement. Il est déjà impossible que tous les pays du monde mangent autant de viande que les Américains. Les comportements alimentaires évolueront nécessairement, notamment dans les pays riches. La première piste à court terme consiste à limiter le gaspillage entre le distributeur et le consommateur. On verra davantage apparaître des produits qui vont correspondre à des portions. Des outils numériques ou électroménagers nous aideront sûrement à manger de façon plus raisonnable. En Angleterre, par exemple, il est déjà interdit de proposer des offres promotionnelles sur la quantité comme trois paquets pour le prix de deux. Autrement dit, pour nourrir tout le monde, il faudra jeter beaucoup moins.
Les produits vont évoluer ?
Oui, puisqu’il faudra en même temps limiter le coût pour l’environnement et parvenir à produire pour tout le monde. La piste principale est de faire évoluer l’élevage pour le rendre plus durable, en utilisant moins d’eau ou de nourriture pour les animaux. On peut imaginer une réduction de trois quarts de la consommation de viande bovine. Mais ce n’est pas si simple dans les faits. Par exemple, une bonne partie de cette viande vient des vaches laitières qui ne vont pas disparaître puisqu’il faudra toujours du lait.

La France produit-elle assez de viande pour sa population ?
À l’exception de la viande de mouton, pour les autres productions la France est autosuffisante. Nous ne sommes pas de toute façon parmi les plus gros consommateurs de viande sur la planète. Quoi qu’il en soit, les pays riches devront montrer la voie en réduisant la consommation de viande. Il faudra faire évoluer les régimes vers davantage de ressources végétales qu’animales, proposer des produits attractifs et respectueux de la planète.

Les produits végétaux comestibles vont-ils changer ?
Certains produits sont riches en protéines comme les fèves, les poix chiches, les lentilles, etc. Mais ils sont peu appréciés des consommateurs, et pas toujours très digestes. On peut parfaitement imaginer que ces produits seront transformés à l’avenir pour être rendus plus attrayants pour le consommateur. Il ne s’agit pas nécessairement de modifications génétiques, mais plutôt d’une évolution de ces matières premières agricoles.

Les insectes ont-ils de l’avenir dans notre assiette ?
À l’Inra, nous ne misons pas beaucoup là-dessus. Le signal est assez faible sur les insectes. J’attends que l’on me démontre que la fabrication de ces produits est plus économique en eau et en énergie. On ne mangera pas du grillon au barbecue avant longtemps. Je pense davantage que l’on pourra en extraire les protéines pour les utiliser dans d’autres produits.

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