lundi 13 août 2012

Grande distribution: Carrefour patine et Leclerc progresse malgré la crise


La crise qui pèse sur le porte-monnaie des Français accentue le fossé entre les magasins Leclerc, qui gagnent du terrain grâce à leur image de rois du prix le plus bas, et Carrefour qui continue de payer ses erreurs stratégiques.
Jeudi, les deux groupes publiaient leurs résultats du premier semestre dans un contraste saisissant. En France, ils ont dégagé un chiffre d'affaires quasi identique: 19,01 milliards pour Carrefour et 19,22 milliards pour Leclerc.

Mais quand les ventes du premier ont glissé de 0,7%, celles de Leclerc ont bondi de 8,6%. Sur l'année, ce dernier veut faire croître son chiffre d'affaires global de 6% à 7%, après 37,8 milliards d'an dernier, tandis que Carrefour ne donne pas de prévision.

En termes de parts de marché, le groupe Carrefour reste premier (21,1% au 10 juin) devant Leclerc (18,1%) et Intermarché (13,6%), selon le pointage de Kantar Worldpanel.
L'objectif du groupement est de devenir le premier en parts de marché et donc de détrôner Carrefour d'ici 2015.

Sur le diagnostic, les deux groupes sont d'accord. En pleine crise, chaque enseigne doit convaincre les consommateurs qu'elle pratique les prix les plus bas.
Michel-Edouard Leclerc a une fois de plus expliqué jeudi que ces résultats confortaient notamment le "positionnement sur les prix bas (de l'enseigne), qui n'est pas qu'une image de communication mais une réalité".

Pour les activités françaises, "l'image-prix est l'indicateur ultime" à considérer, a déclaré de son côté le directeur financier de Carrefour Pierre-Jean Sivignon.
Mais alors que Leclerc axe depuis des années toute sa stratégie de communication sur ce thème et "s'est construit avec constance une image de défense du consommateur", selon Gilles Goldenberg, un consultant indépendant, Carrefour a encore du chemin à faire.

"Constance de Leclerc"

En matière de prix, "les consommateurs ont comparé la constance de Leclerc et l'inconstance de Carrefour et sanctionné" ce dernier, ajoute-t-il.
Depuis sa nomination comme directeur France de Carrefour l'an dernier, Noël Prioux se concentre sur le sujet, délaissant le modèle de promotions occasionnelles au profit d'un effort quotidien sur une large gamme de produits.

Après "une inversion de tendance" depuis la fin du premier trimestre, "nous allons voir dans les deux trimestres à venir si ce qui a été mis en place (...) porte ses fruits", a dit M. Sivignon.
La valse des dirigeants chez Carrefour, qui a changé de patron cette année, n'a pas facilité les choses, quand les Leclerc père et fils règnent sur leur enseigne depuis sa création il y a plus de 50 ans.
Encore aujourd'hui, "Leclerc bénéficie de sa structure d'adhérents qui ne raisonnent pas en retour sur investissement" tandis que Carrefour, numéro deux mondial du secteur, côté en Bourse, doit dégager du rendement à court terme, relève M. Goldenberg.

Au-delà de l'image-prix, les indépendants propriétaires de Leclerc "investissent dans la relation-client, la rénovation de leurs magasins car ils sont installés pour la durée", note Frank Rosenthal, un autre consultant indépendant.
Côté Carrefour, les choses bougent et la décentralisation du groupe est l'une des priorités de son nouveau patron Georges Plassat, qui a demandé en juin "trois ans" de patience aux actionnaires pour redresser la barre.
L'inventeur de l'hypermarché, qui exploite de très grandes surfaces, souffre par ailleurs de la disgrâce de ce format. "Leclerc répond mieux aux attentes des consommateurs" avec ses surfaces moyennes, relève M. Rosenthal.

En revanche, Carrefour enregistre de bonnes performances sur son parc de magasins de proximité, le format en vogue, dans lequel Leclerc est moins présent.
Enfin, les deux groupes se sont lancés dans le développement accéléré du drive, l'achat sur internet suivi d'un retrait de commande en magasin.

Un modèle qui fait rêver les dirigeants de la grande distribution, mais dont la rentabilité reste incertaine.

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