Vous pensiez qu’entre les cinq heures passées devant un écran, les neuf heures à dormir et les huit heures à bosser, il vous restait chaque jour un peu de temps de cerveau disponible ? De quoi vous focaliser, quelques instants, sur un sandwich jambon-beurre Tricatel englouti vite fait entre deux mails.
Eh bien non : Greenpub, une petite régie publicitaire, a pour spécialité de « communiquer aux instants “wait marketing” des pauses repas via des serviettes écologiques équipées de QR code ».
« Solutions “out of home” éco-connectées »
Attendez, il y a plus clair :
« La régie des “wait média”, Greenpub, vous propose de communiquer de façon innovante via des solutions “out of home” éco-connectées. »
En français de tous les jours, ça signifie simplement : profiter de la pause déjeuner du travailleur pressé pour lui fourguer de la publicité pendant qu’il mastique.
Il ne s’agit pas de la réclame sur la table du troquet où il s’est installé (déjà fait), pas non plus sur le panneau qui fait face à la supérette alimentaire où il a acheté son sandwich (déjà fait), pas sur l’emballage du sandwich (déjà fait). Mais sur la seule surface qui restait encore vierge : sa serviette en papier recyclé.
C’est déprimant comme une description de Houellebecq, mais c’est aussi confondant d’enthousiasme sur la nature humaine en général, et sur la belle curiosité des individus en particulier.
Seule solution : manger les yeux fermés
Il faut imaginer que, son smartphone dans la main droite, son jambon-beurre dans la main gauche, le pékin lambda soit suffisamment attiré par le petit code imprimé sur sa serviette, donc, pour aller, hop ! d’un flash d’un seul, atterrir sur une campagne publicitaire pour une compagnie aérienne low-cost.
Une fois sa soif de connaissance étanchée, notre mastiqueur n’aurait plus qu’à s’essuyer la bouche dans sa serviette. Se tamponner les commissures à coup de QR code (code-barres en 2D qui stockent des informations numériques et pouvant être décodés avec un smartphone).
Seule option pour ceux que cette perspective n’enchante pas : manger les yeux fermés. De toute façon, ça leur évitera de poser le regard sur cette étique tranche de jambon bourrée de phosphates rapidement jetée dans un bout de pain mou qui ignore jusqu’à l’existence du mot « levain ».
Source: Rue89 (http://goo.gl/aKTn6)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire